Au Venezuela, Maduro convoite le vote évangélique

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Se présentant comme un candidat tout à la fois "chrétien" et "marxiste" à sa réélection, le président vénézuélien Nicolas Maduro cherche à attirer le vote évangélique lors du scrutin présidentiel du 28 juillet dont il ne part pas favori.

"Je remets volontairement ma nation au Christ (...) J'ai trouvé Dieu sur mon chemin, je l'ai vu et j'ai eu la foi", a déclaré M. Maduro mi-juin durant un "acte chrétien de repentance nationale et d'intronisation de Jésus-Christ" au palais présidentiel de Miraflores, dont il dit qu'il est "la maison de Dieu et la maison du peuple dans le Christ".

"En tant qu'autorité de cette patrie, je vous demande pardon au nom de mon gouvernement et de mon peuple", s'est exprimé M. Maduro, vêtu de blanc, implorant Dieu face à une audience de pasteurs évangéliques priant mains levées vers le ciel. "Pardonnez-nous, guérissez notre pays."

Pour rattraper son retard dans les intentions de vote, le camp présidentiel courtise la communauté évangélique, qui selon des estimations représente entre 1,2 million et 1,5 million d'électeurs, le gouvernement lui consacrant d'importantes ressources publiques.

En mars, M. Maduro a lancé la prime du "Bon pasteur", une somme de 14 dollars par mois que reçoivent quelque 20.000 ministres du culte. Un an plus tôt, il avait créé le plan "Mon église bien équipée", qui permet de rénover et équiper des églises.

D'après l'institut de sondage ORC, 34% du vote évangélique va se reporter sur sa personne et 20% sur le candidat de l'opposition majoritaire, Edmundo Gonzalez Urrutia.

"C'est du prosélytisme sous couvert de religiosité", estime pour l'AFP Maria Veronica Torres, professeure et chercheuse à l'université de Monteavila. "Ces églises évangéliques qui le soutiennent soi-disant n'ajoutent pas de voix mais maintiennent celles qu'elles ont déjà."

Ce rapprochement n'est pas nouveau. L'ancien président Hugo Chavez (1999-2013), dont M. Maduro se dit l'héritier, a lui aussi entretenu des relations étroites avec l'Eglise évangélique tout en prenant ses distances avec l'Eglise catholique, qui le critiquait.

"Il nous a rendus visibles", estime Amir Alcoba, pasteur d'une église évangélique à Santa Lucia, dans le quartier défavorisé de Valles del Tuy, près de Caracas. "Jusqu'à l'arrivée au pouvoir du président Chavez, il y avait une séparation très nette entre les hommes politiques et les évangéliques."

"Ami de l'Eglise"

L'église Filadelfia du pasteur Alcoba organise dans ce quartier des jeux pour faire gagner de la nourriture, dans un quartier où un kilo de riz, de pâtes ou de sucre constitue une aide salutaire.

Le père Alcoba affirme qu'il "évite autant que possible" de parler politique dans ses sermons. "Cependant, j'encourage les paroissiens à exercer leur droit de vote", dit-il.

Pedro Rafael Iriarte, un retraité de 66 ans, dit qu'il "vote religieusement" à chaque élection et dénonce le rapprochement "hypocrite" du président Maduro avec les évangélistes, "une stratégie politique pour s'attirer des votes".

Marcia de Serrada, une enseignante de 55 ans, se félicite, elle, des aides de l'Etat car "il y a beaucoup de besoins".

Filadelfia a ainsi reçu "quelques chaises, des micros, un ventilateur", indique le pasteur Alcoba, selon lequel "Maduro est un ami de l'Eglise".

"Beaucoup disent que c'est de l'achat" de vote mais "Maduro ne fait que remplir son devoir de président", estime le pasteur.

L'État de Miranda (centre-nord) où se trouve le quartier de Valles del Tuy, compte quelque 5.000 églises évangéliques et 650.000 fidèles, selon Juan Gomez, pasteur et secrétaire aux Affaires religieuses de l'Etat.

Pour ne pas heurter la communauté évangélique, le gouvernement Maduro s'est toujours refusé de légiférer sur l'avortement ou le mariage pour tous.

L'opposition de droite, encore plus conservatrice sur ces questions de société, n'aborde que peu, voire pas du tout le sujet et a reçu le soutien de 10 pasteurs "convaincus de la nécessité et du mandat divin de parvenir à un changement de système par des moyens pacifiques et électoraux".

La Rédaction (avec AFP) 

Crédit image : Shutterstock / StringerAL

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